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Origines des Indiens

L'Empire socialiste des Inka

par Louis Baudin
Professeur à la faculté de Droit de Dijon

Chapitre III — L'Indien et ses origines

 

Au physique, l'Indien du plateau, le Kičua, a un type très caractérisé. De petite taille, trapu, massif suivant l'expression de d'Orbigny 1, de teint non pas rouge comme on ledit, ni bronzé comme l'écrit Humboldt 2, mais brun olivâtre, la peau dure, la face ovale et large, la tête grosse, le front légèrement bombé, la bouche grande, les mâchoires fortes, les lèvres minces, les dents très blanches et bien rangées, les sourcils noirs arqués, les yeux noirs, petits et creux, la cornée jaunâtre, les cils longs, les pommettes saillantes, le nez, assez long, les narines très ouvertes, les cheveux noirs, épais, lisses et longs, la barbe rare, il offre une physionomie régulière mais dépourvue de finesse. Ses muscles saillants, sa poitrine large, ses épaules effacées lui donnent une apparence de force un peu lourde, malgré la petitesse des pieds et des mains et l'étroitesse des chevilles.

Bâties sur le même modèle, les femmes manquent de grâce et de souplesse et ne sauraient rivaliser avec les Indiennes des forêts, plus grandes et plus sveltes ; par contre, tous, hommes et femmes, donnent une impression de santé ; rares sont chez eux les bossus, les bancals ou les chauves 3.

D'où vient-il, cet Indien ? Problème important, car les sociétés ne se construisent pas en un jour, et celle que nous nous proposons d'étudier a été précédée d'une longue évolution qui l'explique au moins partiellement; problème difficile à résoudre, en raison de l'ignorance des Indiens eux-mêmes et des erreurs accumulées par les chroniqueurs espagnols. Ceux-ci, exception faite de Montesinos et de Román y Zamora, ont limité toute l'histoire du Pérou à celle des Inka. Avant l'établissement de cet Empire, if n'y avait selon eux que des tribus éparses, sans liens communs, barbares et idolâtres. Certains, comme Garcilaso, noircissent le tableau le plus qu'ils peuvent pour mettre mieux en valeur la civilisation des Inka : les Indiens de jadis étaient deœ.uchés et cannibales se régalant de la chair et du sang de leurs ennemis 4, ils étaient perpétuellement en lutte les uns contre les autres 5, ne connaissaient pas de chef, sinon les capitaines qu'ils choisissaient pour conduire les guerres 6, et le même mot revient toujours sous la plume des écrivains : les groupements d'indigènes étaient de véritables béhétries 7. On désignait en en Espagne par béhétries les bourgs libres dont les habitants avaient le privilège d'élire leur seigneur, soit parmi les membres d'une famille déterminée (béhétrie de lignage), soit à leur guise (béhétrie de mer à mer). Ce mot signifie donc que les Indiens n'obéissaient qu'à des chefs choisis par eux-mêmes 8. Les chroniqueurs sont d'ailleurs loin d'être clairs : les uns parlent de souverains élus, les autres de monarques héréditaires, quelques-uns de caciques ou de kuraka, sans préciser 9. Beaucoup insistent sur le désordre qui régnait parmi les tribus. Herrera remarque que la situation n'a pas changé à cet égard de son temps au Chili, en Nouvelle Grenade et au Guatémala 10, et Ulloa compare les Indiens de l'époque préinka à des bêtes féroces 11.

Cette erreur fondamentale des premiers historiens a été la source de nombreuses inexactitudes chez les auteurs postérieurs.

Dans le courant de ces dernières années, l'archéologie a fait sortir de l'ombre tout un passé que l'on soupçonnait à peine et dont nous allons retracer les grandes lignes, très sommairement, sans nous livrer à une critique qui nous ferait sortir du cadre de notre ouvrage et simplement pour situer la civilisation des Inka.

 

Le premier point, qui ne fait plus de doute aujourd'hui, c'est l'origine asiatique ou australienne des Indiens ; Holmes, Brinton, Boule, Verneau, Rivet, Hrdlička, et d'autres encore se sont prononcés en ce sens. Les rouges sont les fils des jaunes, non par le hasard d'un naufrage, comme le veut la théorie pittoresquement appelée de la jonque échouée, car en ce cas les Péruviens eussent été de bons navigateurs, alors que ceux-ci n'ont jamais disposé que d'engins très imparfaits 12, mais par la voie de grandes migrations qui auraient passé l'isthme de Behring et seraient descendues du nord au sud de l'Amérique en des temps très anciens 13. Les objets sud-américains d'origine mélanésienne, tels que le propulseur, le hamac, la sarbacane, le tambour à signaux, la flûte de Pan, la massue à tête de pierre étoilée et les ressemblances de langue surtout attestent cette parenté 14.

Cette lente invasion humaine n'a pas suivi simplement les rives du Pacifique, eu Amérique du Sud tout au moins. Les grands centres de civilisation de l'Amérique centrale ont rayonné dans toutes les directions et à des dates différentes. Il semble que les premiers hommes soient venus, non pas le long des côtes où ils étaient repoussés par les vents alizés qui soufflent du sud au nord et par le courant de Humboldt, mais par les Antilles et par les territoires du Venezuela et du Brésil en remontant les rivières jusqu'à leurs sources 15. Ainsi s'expliqueraient ces traces d'invasion amazonienne que l'on note à des époques reculées. La hache par éternelle révèle une influence orientale très ancienne en Équateur, car la pipe qui date de l'époque précolombienne au Brésil et au Venezuela n'a pas atteint le plateau 16. L'archéologie, l'anthropologie et la linguistique sont d'accord aujourd'hui pour reconnaître dans les Uru, peuple vivant au bord des lacs Titicaca et Poopo, les descendants des anciens Amazoniens Arawak qui furent sans doute les premiers habitants du plateau. Les Uru sont demeurés pêcheurs et chasseurs comme leurs ancêtres ; leur langue : le Pukina, contient un grand nombre de radicaux arawak, il n'est pas jusqu'à leur costume et à leur habitation, qui ne rappellent le type amazonien. Jadis ils se sont étendus jusque sur les rivages du Pacifique et, à l'époque de la conquête, leur langue était encore parlée dans une grande partie du plateau 17.

Il peut sembler surprenant que des civilisations aient pu venir du bassin amazonien, et pourtant on découvre aujourd'hui des vestiges d'agglomérations dans ces contrées inhospitalières, notamment dans le haut Mamore, le Cumany, le bassin du Beni. Ainsi ce ne sont pas les hommes du plateau aride qui sont descendus dans les plaines amazoniennes à la recherche de terres fertiles, au contraire ce sont les peuples des plaines qui sont montés à l'assaut du plateau. Que cette arrivée de l'homme er: Amérique soit très ancienne, nous pouvons l'affirmer en observant les pommes de terre et les lamas, car les différences qui existent entre le précieux tubercule tel que les Indiens l'obtenaient et celui que l'on trouve à l'état sauvage supposent des siècles de culture, et il a fallu des siècles aussi pour transformer les huanacos et les vigognes, peureux et indociles, en paisibles lamas et alpacas, de toison et de couleur autres et incapables de vivre sans l'aide de l'homme 18.

L'invasion humaine venue du nord et de l'est n'a pas été unique ; elle a déferlé par vagues successives qui ont recouvert peu à peu tout le continent. C'est ainsi que, selon le docteur Rivet, une migration postérieure à celle des Uru aurait superposé à ceux-ci des éléments amazoniens nouveaux et leur aurait enseigné l'usage du labret, du propulseur, de la flûte de Pan et des têtes humaines-trophées, puis une troisième vague d'origine Karib (Guyane) aurait atteint seulement la Colombie et une quatrième vague orientale aurait pénétré par l'Équateur et apporté sur le plateau les trois formes de hache : à encoches, à oreilles, à tranchant semi-circulaire C'est entre la troisième et la quatrième vagues qu'il faudrait intercaler une migration directe centro-amé­ricaine, venue par la Colombie et qui aurait gagné l'Équateur 19.

Mais les indigènes descendus du Nord ont à leur tour parfois émigré dans d'autres directions, et certains ont repris en sens inverse le chemin suivi par leurs ancêtres. Après le flux est venu le reflux. « L'Amérique du Sud est comme un flacon au col étroit ; il se remplit naturellement parle haut, mais le liquide une fois en excès sort par le même orifice 20. » Une grande incertitude règne encore sur toute cette préhistoire américaine: aussi sans chercher à prendre position dans des controverses dont la solution appartient aux archéologues et aux ethnologues et sans tenter de fournir des dates, nous nous bornerons à énumérer les différentes civilisations qui sont nées de la superposition des influences amazonienne et centro-américaine et se sont succédé dans cette partie de l'Amérique où les Inka ont ensuite fondé leur Empire 21.

 

Le flux

La civilisation du plateau équatoriale, d'origine colombienne 22. On trouve ses traces aussi bien dans la province d'Imbabura, au nord de l'Équa­teur 23 que dans celles de Chimborazo et de Tunguragua au centre 24 et celle de Cañar au sud 25. Des fouilles récentes ont prouvé que les immigrants colombiens étaient avant tout des agriculteurs et qu'ils avaient appris à travailler l'or, mais qu'ils ignoraient l'argent et le bronze.

Les civilisations de Nazca et d'Ica. Les habitants de ces villes anciennes ne savaient pas travailler les métaux, mais leur céramique aux dessins conventionnels est d'une belle richesse de décoration ; malheureusement, en raison de son caractère surtout religieux, elle nous donne peu de renseignements sur la vie de la population 26.

La grande civilisation Čimu ou Yunga (Trujillo 27). Cet État était encore florissant au temps des Inka qui le conquirent vers le milieu du XVe siècle ; il s'étendait vers l'est sur les contreforts des Andes occidentales 28 et sur la côte de Parmunca au sud à Túmbez au nord 29. La capitale était une cité importante, dont les vestiges couvrent un territoire considérable 30 ; à Pachacamac se dressait le principal temple, lieu de pèlerinages, et la forteresse de Parmunca défendait l'accès du royaume du côté du sud. Pour nous renseigner sur la vie sociale, nous n'avons que les dessins des étoffes et des poteries. Les étoffes, tissées à la façon des tapisseries de haute lisse, sont surtout décorées de figures géométriques et d'animaux stylisés, mais les poteries, bien cuites, colorées souvent en rouge brun, portent des dessins qui nous révèlent l'existence d'une civilisation déjà fort avancée : une cour fastueuse, des fonctionnaires, des artisans, des serviteurs, toute une hiérarchie sociale. Elles nous apprennent en même temps que les pratiques immorales n'étaient pas rares et que l'hygiène faisait absolument défaut 31.

La civilisation de la côte équatorienne. Les bas-reliefs trouvés par la mission Saville témoignent de son importance, mais la vie sociale semble avoir été très primitive ; les villages étaient formés de maisons de bois couvertes de feuilles de palmiers 32. La région fut conquise par les Inka vers la fin du XVe siècle.

Cette civilisation a-t-elle submergé en partie le plateau voisin de l'Équateur ? Velasco le prétend; d'après lui, les habitants de la côte émigrèrent vers les Andes à la fin du Xe siècle et fondèrent l'Empire kara 33.

 

Le reflux

C'est sur le plateau péruvien que le reflux s'est fait sentir ; mais ici nous nous heurtons à une difficulté particulière : le climat pluvieux de la sierra a détruit la plupart des vestiges des temps passés.

Comme nous l'avons vu, les premiers immigrants semblent avoir été les peuples amazoniens Uru. Ceux-ci ont été soumis postérieurement par une nation d'agriculteurs et de pasteurs d'origine obscure, les Aymara 34, fondateurs de la mystérieuse Tiahuanaco.

 

Les ruines de Tiahuanaco se trouvent sur les bords du lac Titicaca dans un de ces lieux du globe où il est difficile d'imaginer, qu'une grande ville ait pu exister si l'on n'admet pas une modification du milieu. En effet, dans des temps très anciens, les Andes étaient moins élevées qu'aujourd'hui ; elles laissaient passer les nuages chargés d'eau, et les côtes péruviennes étaient par suite humides, et boisées. Quant au lac Titicaca, son trop-plein se déversait-par le seuil où repose La Paz, roulait vers l'Amazone et « le plus grand lac de la terre alimentait le plus grand fleuve » 35. Mais il est inutile de remonter si loin dans le passé : en Haute Argentine, entre San Juan et Mendoza, le lac de Guanacache, aujourd'hui de petite dimension, était très grand autrefois, et les Indiens y menaient leurs barques comme sur le lac Titicaca 36 ; la région située entre les provinces de Rioja et de Catamarca en République Argentine, actuellement sablonneuse et désertique, était au XVIIe siècle recouverte de forêts de prosopis ; dans le désert d'Atacama, le mineur déterre parfois des racines d'arbres et le territoire situé entre le Huasco et le Loa, au Chili, aujourd'hui aride, était encore boisé au moment de l'arrivée des Espagnols 37. Des secousses sismiques et des éruptions ont également transformé des contrées dans ces pays volcaniques qui forment le « cercle de feu » du Pacifique. Les provinces équatoriennes de Leon et de Tungunragua, jadis fertiles, ont été dévastées au XVIIIe siècle par une série d'éruptions.

 

Nous ne savons rien de la vie sociale des habitants, sinon que la plupart étaient des cultivateurs, car leur langue est riche en termes agricoles, qu'ils savaient travailler la pierre, fabriquer des objets de cuivre, de bronze et des poteries, qu'ils faisaient du commerce avec la côte : on a trouvé des vases aymará en Équateur, des ornements sur le rivage du Pacifique et le trafic s'étendait peut-être à l'Amérique du Centre.

Nous ne savons rien de la capitale elle-même, sinon qu'elle dresse encore au milieu d'un pays désert sa célèbre porte monolithe du Soleil et qu'elle garde ses assises de pierres cachées dans le sol où l'on commence à peine à les découvrir 38. A coup sûr, elle était i, grand centre à la fois politique et religieux, car les fouilles ont mis à jour des squelettes, des outils et des vases venant de toute l'Amérique 39.

D'autres cités devaient encore faire partie de l'Empire, mais c'est à peine si nous pouvons relever çà et là les traces de leurs murailles cyclopéennes à Taraco sur les rives du lac Titicaca, à Ollataytambo au Pérou, à Pachacamac sous les ruines du temple de l'époque des Čimu qui est déjà postérieure à celle des Aymará, enfin en Bolivie, dans la province de Carangas 40.

Nous ne savons rien non plus de l'Empire aymará, sauf qu'il s'étendait sur un très large territoire, puisque l'on retrouve aujourd'hui des noms de lieux aymará dans l'Argentine septentrionale 41 et des dialectes aymará dans la province de Huarochiri au Pérou et dans la région d'Arica, sur le littoral, et puisque son style a imprégné les arts locaux de la côte, la céramique et le textile 42. Ce style conventionnel nous donne seulement l'impression que le peuple capable de lui donner naissance devait se plier déjà à des règles de vie rigides et était probablement soumis à un pouvoir central absolu et théocratique.

Ce qui nous reste des Aymará, c'est leur langue. Le profane pensera que c'est là peu de chose ; il se trompe ; la langue est l'expression vivante d'un peuple ; riche en termes abstraits, elle nous prouve une haute culture intellectuelle ; abondante en mots techniques, elle est l'indice d'un développement économique avancé ; complexe et adroitement agencée, elle atteste une longue évolution ; quand un mot exprime une idée, c'est que l'idée a été pleinement conçue, et quand un mot désigne un lieu, c'est que le lieu a été occupé. Chacun d'eux marque dans un domaine différent une conquête de l'homme.

Or la langue aymará est extrêmement riche ; elle possède des affixes formatifs qui permettent de modifier les racines verbales, et renferme une quantité de synonymes capables de marquer les plus délicates nuances de la pensée ; à tel point que M. Uhle la trouve supérieure à la langue kičua elle-même 43.

 

La civilisation de Tiahuanaco sombra dans quelque cataclysme, invasion, épidémie, tremblement de terre 44, et après elle régna une ère de désordre et de troubles jusqu'au jour où apparut le deuxième mouvement de reflux, celui des Kičua, sous leur chefs Inka, dont l'origine est aussi mystérieuse que celle des Aymará 45. Sans doute, les Kičua et les Aymará se ressemblent à bien des égards et il est naturel que d'Orbigny et Markham aient été tentés de déclarer que les uns proviennent des autres. Il existe cependant entre eux certaines différences. Au physique, la face des Aymará est plus ovale ou losangique, le buste plus élevé proportionnellement à la taille, celle-ci un peu plus haute, les yeux plus fréquemment bridés que chez les Kičua 46. Au moral, les Aymará sont plus taciturnes, plus méfiants, moins soumis et moins doux que leurs voisins.

Fait plus frappant encore, les langues parlées par ces deux groupes ethniques contiennent, 40 % de mots communs, mais ont entre elles des différences de syntaxe inexplicable si l'on admet que l'une dérive de l'autre.

Actuellement, la limite entre les Aymará et les Kičua est située au nord-est du lacTiticaca à Cojata et au nord-ouest de ce lac à Puno 47.

Comme le dit Angrand, les Inka sont vraisemblablement autre chose que « le dernier soupir et la dernière lueur de cette civilisation sans nom, sans passé, sans histoire connue, qui n'a d'autres manifestations sensibles pour nous que les ruines silencieuses de Tiaguanaco » 48. C'est d'eux que nous aurons à parler ici. Cependant, avant d'aborder leur étude et pour être complet, nous devrions ajouter au tableau sommaire que nous venons de brosser les civilisations des peuplades équatoriennes comme les Kara, les Puruha, les Kañari, sur lesquelles nous avons peu d'indications 49, et le groupe chilien des Činca-Atakam, qui atteignit une grande prospérité entre le XIIe et le XIVe siècles 50. Quant aux Čibča de Colombie de Colombie, qui ont une organisation sociale intéressante, leur territoire est toujours resté en dehors de l'action des Inka. Peut-être y eut-il encore ailleurs d'autres centres de vie importants, mais qui ne sont pas assez connus pour que nous puissions en parler ici 51.

 

Ce rapide aperçu nous permet de dégager quelques observations essentielles : On voit d'abord combien on aurait tort de regarder les Inka comme un peuple primitif ; avant eux déjà, ont alterné des périodes de prospérité et de dépression. Nul ne saurait dire si l'Indien du XVe siècle était supérieur ou inférieur à celui de l'époque de Tiahuanaco. Le progrès n'est pas une ligne droite, et l'idée d'une évolution continue ou même intermittente vers un état meilleur est un postulat que l'on ne rencontre plus que dans les manuels scolaires.

Ensuite, la civilisation péruvienne n'a subi aucune influence méditerranéenne. Les hypothèses relatives à des immigrations juives ou égyptiennes doivent être rejetées, car les Indiens à l'époque de la conquête ne connaissaient ni le fer, ni la roue, ni le verre, ni le blé, et l'on sait aujourd'hui qu'eux-mêmes avaient découvert le cuivre et le bronze 52.Nous sommes donc bien en face de civilisations autochtones, ce qui augmente singulièrement l'intérêt que présente leur étude 53.

En troisième lieu, les obstacles naturels, si peu franchissables qu'ils soient, n'ont pas empêché des migrations nombreuses de se produire. Ce serait une erreur de penser que le cloisonnement ait eu pour conséquence de fixer les peuples à tout jamais dans des vallées dont ils ne sortaient pas. On est même étonné que tant dedéplacements aient pu avoir lieu, car, outre ceux dont nous avons parlé, des mouvements secondaires ont pris naissance çà et là dans l'Amérique du Sud. Ainsi, les habitants de l'Atacama ont émigré vers le nord et vers la sierra 54et des groupes de Guarani venus du centre de l'Amérique du Sud se sont établis dans le nord de la République Argentine actuelle, plus tard les tribus des Andes les ont refoulés, puis sont revenues à leur point de départ 55.

En quatrième lieu, il a existé en Amérique du Sud un substratum commun, d'origine amazonienne ; la similitude des instruments compliqués découverts dans des régions différents et fabriqués avec de la matière première locale prouve « une parenté entre les civilisations andines 56 » ; c'est en réalité une même civilisation qui a évolué différemment suivant les lieux, qu'il s'agisse des Kara au nord ou des Kalčaki au sud 57.

Cette homogénéité de culture qui reparaît sous les différences locales aide à comprendre comment les Inka parvenaient à assimiler, rapidement les tribus conquises.

M. Uhle n'a pas tort, on le voit, de qualifier d' « ingrats » ces souverains qui, ayant hérité de la culture de leur ancêtres, ont soigneusement. caché origine de ce qu'ils avaient reçu 58.

L'histoire même de cette grande dynastie est extrêmement confuse à bien des égards, et nous ne chercherons pas à la rendre plus claire. Les noms des hommes et la date exacte des faits nous sont indifférents ; la nature et l'ordre de ces faits et le développement des institutions seuls nous intéressent. Cependant, pour fixer les idées, nous indiquerons en quelques lignes quelle semble avoir été la généalogie des Inka.

 

La plupart des chroniqueurs espagnols, dont Garcilaso, appellent le premier souverain Manko-Kapak et le deuxième Sinši Roka. Or Montesinos et Acosta font remonter les Inka à un souverain postérieur nommé Inka-Roka 59. Où est la vérité ? Comme nous l'avons vu, après que la civilisation de Tiahuanaco eût brilléde tout son éclat, une longue éclipse se produisit. Alors des sinši prirent la direction des différentes tribus 60. Ces sinši étaient des chefs temporaires nommés par les groupements primitifs de population (ayl'u) dans un but de chasse, de pêche ou de guerre ; sans doute, devenus permanents, ont-ils été les premiers souverains. On comprend dès lors qu'il existe aujourd'hui une tendance à considérer Manko-Kapak et Sinši Roka non comme deux individus, mais comme deux dynasties, comme des êtres mythiques. Le caractère légendaire attribué au premier d'entre eux par les chroniqueurs eux-mêmes confirme cette interprétation  61.

Il est certain qu'à un moment donné de l'histoire les Inka s'établirent, de gré ou de force, dans la vallée de Cuzco, déjà peuplée, et devinrent tous du même coup une classe dominante. Dès lors, la conquête du plateau commença et, parallèlement, s'établit une organisation de plus en plus savante. Les grandes luttes contre les tribus rivales : Kol'a d'abord, Čanka ensuite, fortifièrent le pouvoir central, et permirent à la caste supérieure de se libérer définitivement du cadre géographique primitif, d'accroître ses connaissances et d'augmenter ses moyens d'action. Ainsi de plus en plus l'élite se détacha de la masse.

On ne sait pas combien de temps les Inka ont régné : 5 à 600 ans suivant Blas Valera, 3 à 400 suivant Ondegardo et Acosta, plus de 500 suivant Balboa, près de 1 000 suivant Sarmiento. Garcilaso donne une liste de treize monarques, mais quelques-uns font probablement double emploi, car on en trouve un moins grand nombre dans Balboa et dans Montesinos.

Voici quelle a été approximativement la suite des souverains ; nous ne mentionnerons pas les dates de leurs règnes, car elles varient suivant les auteurs ; nous indiquerons seulement en quel siècle vraisemblablement il faut les situer 62 (Voir tableau p. 46).

Le dernier souverain, Huayna-Kapak avait, contrairement à la coutume, divisé son Empire, devenu trop grand, entre deux de ses fils, l'un légitime, Huaskar, l'autre bâtard, Atahualpa ; une guerre civile éclata à la mort du monarque entre ces deux frères ennemis, et Atahualpa vainqueur fit massacrer Huaskar et sa famille. Les Espagnols arrivèrent juste à point pour profiter du désordre et s'établir en maîtres. A ce moment, l'Empire s'étendait sur plus de 4 000 kilomètres de longueur du rio Ancasmayo, à 2° nord de l'équateur, au rio Maule, à 35° au sud de cette ligne, et sa superficie était égale à six fois celle de la France environ 63.

Nous examinerons ici l'organisation sociale qui existait à cette époque. Avant le XVe siècle, le système n'avait pas atteint sa perfection, après 1525 il subsistait encore, mais les troubles intérieurs en avaient gâté l'application. En réalité, toute l'histoire des Inka s'est déroulée dans l'espace de quatre siècles: les XIIe et XIIIe, pendant lesquels les souverains ne sont guère que les chefs d'une tribu ou d'une confédération de tribus comme bien d'autres (Čačapoya, Huanuko, Činča, Čanka, etc.) ; le XIVe, siècle de la préparation, et le XVe, celui de l'apogée 64. L'Empire n'a vraiment duré que deux siècles ; c'est peu de chose pour établir sur des assises solides une organisation aussi vaste, et pourtant les Inka ont brillé d'un tel éclat, que jusqu'à nos jours les historiens éblouis n'ont pas aperçu dans leur ombre les grandes civilisations qui les ont précédés, et ils ont marqué si profondément les peuples de leur empreinte que le cours des siècles n'a pu encore l'effacer et que l'ethnologue la retrouve à tout instant chez l'Indien d'aujourd'hui.


Souverains

Époques 65

Principales conquêtes

Observations

Manko-Kapak.

 

 

Personnage mythiques

Sinši-Roka.

 

 

 

Loke-Yupanki.

Fin du XIIe ou début du XIIIe siècle.

Soumission des Kaña, Kol'a.

 

Mayta-Kapak

XIIIe siècle.

A l'ouest vers Moquegua, Arequipa ; au sud vers Tiahuanaco.

Soumission des Čumbivilka, des Pasaka.

 

Kapak-Yupanki.

XIIIe siècle.

Soumission des Aymará, des Lukana. A l'ouest vers Nazca, au sud vers Potosi.

 

Inka-Roka.

Début du XIVe siècle.

Au sud vers Chuquisaca, au nord vers Andahuaylas. Guerre des Čanka.

Le premier Sapa-Inka (Inka suprême).

Yahuar-Huakok.

XIVe siècle.

Soumission des Kil'aka.

Battu par les Čanka, abdique.

Virakoča.

XIVe siècle.

Guerre des Čanka (suite). Au nord vers Huamanca, au sud vers Tucuman.

 

(Le fils de Virakoča, le bâtard Urko, déclaré héritier par son père, n'a peut-être pas pris le pouvoir, ou, s'il a réellement régné, comme le veulent Herrera et Ciez de León, son règne a été très court.)

Pačakutek.

Début du XVe siècle.

Au nord, vers Huama ; sur la côte vers Pachacamac, Parmunca. Conquête du royaume des Čimu.

Garcilaso, suivi par Markham, intercale ici un certain Inka Yupanki, qui en réalité se confond avec Pačakutek.

Tupak-Yupanki.

Deuxième moitié du XVe jusque vers 1485.

Au nord, vers Chachapoyas, Muyubamma. Au sud, vers le río Maule : soumission des Kañari. Guerre des Kara.

 

Huayan-Kapak.

De 1485 environ à 1525.

Au nord soumission des Kara. A l'est refoulement des Guarani.

 

Notes

1 L'homme américain, t. I, p. 108.

2 Voyage aux régions équinoxales, t. III, p. 364. L'Indien n'est pas non plus couleur de cuivre comme le prétend P. Bouguer (La figure de la terre p. 101.)

3 D'Orbigny. L'homme américain, t. I, p. 117 et suiv. – Fenis donne les mesures des Indiens dans son ouvrage : The lndians of Cuzco and the Apurimac, s.  1., 1916.

4 Comentarios, liv. l, ch. 9.

5 Santillán. Relación, par. 4. – Cieza de León. Crónica. Primera parte, chap. LXXIX.

6 Cieza de León. Crónica. Segunda parte, chap. 4. – J. de la Espada. Relacianes geográficas, t. I, p. 84.

7 Sarmiento. Geschichte, chap. 8. – Morua. Historia, t. 1, chap. 1. Cieza de León qualifie encore de béhétries des tribus qui existaient sur la côte de l'Equateur lors de son voyage. Crónica. Pri­mera parte, ch. 1.

8 Markham (The Incas of Peru, chap. XI) proteste contre l'appellation de béhétrie comme si elle était forcément péjorative. Elle l'était souvent en effet sous la plume des chroniqueurs, cepen­dant les béhétries étaient fort adinirées par un grand nombre d'écrivains espagnols ; c'est seulement sur leur déclin que la liberté dégénéra en anarchie et que des troubles éclatèrent qui discréditèrent complètement cette institution (Cárdenas. Ensayo.sobre la historia de la propiediad terri­torial en España. Madrid, 1873, t. I, p. 227. López de Ayala Alvarez. Memoria. Madrid, 1896, p. 243, n. 1).

9 Relacianes geográficas, t. 1 p. 149-188; t. 3. p. 96. Herrera explique que les rois se faisaient servir comme des dieux et traitaient leurs sujets comme des bêtes, et que c'était pour ce motif que beaucoup de tribus ne voulaient plus de souverain et vivaient en béhétries (Historia géneral, déc. 5, liv. 3, chap, 6).

10 Herrera. Historia ,general, loc. cit.

11 Historia de los Incas, p. 212.

12 Joyce. South-American Archeology, p. 189.

13 Le docteur Rivet pense que des éléments mélanésiens ont pu gagner l'Amérique du Sud en cheminant le long du Continent antarctique, il y a 6 000 ans environ (Communication faite au 22e Congrès international des Américanistes, à Rome, le 27 septembre 1926).

14 Nordenskiöld. Une contribution à la connaissance de l'anthropogéographie d'Amérique. Journal de la Société des Américanistes de Paris, 1911. – H. Vignaud. Le problème du peuplement initial de l'Amérique. Journal de la Société des Américanistes de Paris, 1922. Le docteur Rivet a pu récemment rattacher deux groupes de langues américaines aux langues australiennes et malayo-poly­nésiennes (langue hoka de Californie et langue des Patagons. Les origines de l'homme américain. L'Anthropologie, t. XXXV, 1925, n° 3). Ces migrations asiatiques remontent au plus tôt à la fin de la période quaternaire, par conséquent elles n'ont pu emprunter la voie de terre en passant par quelque continent disparu. P. Irigoyen dans ses Inducciones acerca de la civilización incáica (p. 807) passe en revue les hypothèses qui ont été émises au sujet des habitants du Vieux Continent qui auraient débarqué les premiers en Amérique : Marins du roi Salomon, Carthaginois, Romains, Egyptiens, Phéniciens, Mongols.

15 Nous avons de la peine aujourd'hui à nous représenter les difficultés que les barques rencontraient pour descendre le long des côtes du Pacifique. Il semble, en regardant la carte, que des marins pouvaient aisément se rendre de l'Amérique centrale au Pérou. Rien de plus instructif à cet égard que le récit de Benzoni, à qui il ne fallut pas moins de trois mois pour aller de Panama à Caraque (Bahia de Caráques), village situé au nord-ouest de la République actuelle de l'Equateur sous la ligne équatoriale. Son navire était obligé de jeter,]'ancre chaque nuit et il restait parfois pendant des semaines entières sans pouvoir avancer, à cause des vents et des courants contraires (Historia del Mondo Nuovo, trad. angl., p. 238). Sans doute à certaines époques les brises sont favorables à la navigation, mais une longue expérience seule pouvait instruire les marins à cet égard. Sur les côtes péruviennes, l'océan lui-même semblait repousser les chercheurs d'aventures et les immigrants qui venaient du nord.

16 Sinon dans la région diagit et au Chili septentrional à l'époque inka. Rivet. Les éléments constitutifs des civilisations du Nord-Ouest et de l'Ouest sud-américain. 21e Congrès des Américanistes. Göteborg, 1924, p. 5. – Verneau et Rivet. Ethnographie ancienne de l'Equateur, p. 240.

17 Ils occupaient une région comprise sur le plateau entre le nord du lac Titicaca et la frontière actuelle de la République Argentine et sur la côte entre Arequipa et le 28e degré de latitude sud (Rivet. Les éléments constitutifs, op. cit., p. 2, - De Créqui-Montfort et Rivet. L'origine des aborigènes du Pérou et de la Bolivie. Académie des Inscriptions et Belles Lettres. Compte rendu des séances de l'année 1914. Séance du 27 mars. – De Créqui-Montfort et Rivet. La langue uru ou pukina. Journal de la Société des Américanistes de Paris. 1925, p. 211).

18 H. Urteaga. El antiguo Peru á la ley de la arqueología y de la crítica. Revista histórica de Lima, 1909, chap. I.

19 Rivet. Les éléments constitutifs, op. cit., p. 2 et suiv.

20 Otto von Buchwald. Migraciones sud-americanas. Boletín de la sociedad ecuatoriana de estudios históricos americanos, 1918, p. 236.

21 D'après les travaux de Max Uhle parus dans le Boletín de la Academia nacional de Quito et la Revista histórica de Lima et ceux du docteur Rivet, déjà cités.

22 Beuchat et Rivet. Affinité des langues du Sud de la Colombie et du Nord de l'Équateur. Le Museon, Louvain, 1910. – Verneau et Rivet. Ethnographie ancienne de l'Equateur. Passim.

23 Jijón y Caamaño. Nueva contribución al conocimiento de los aborígenes de la provincia de Imbabura de la República del Ecuador. Boletín de la sociedad ecuatoriana de estudios históricos ame­ricanos, 1920, 1. 4, p. 223.

24 Jijón y Caamaño. Puruha. Boletín de la Academia nacional de historia. 1921, t. 2, p. 27.

25 G. Suárez. Historia general de la República del Ecuador. 2e partie, p. 18 et 1ère partie, p. 148.

26 Beuchat. Manuel, 4 e partie, chap. 6. – Hrdlička. Some results of recent anthropological explo­ration in Peru. Washington, 1911. – A. Means. A study, p. 426.

27 Nous préférons désigner cette civilisation sous le nom de Čimu plutôt que sous celui de Yunga, ce dernier mot étant employé d'une façon générale pour indiquer toutes les régions chaudes, aussi bien sur la côte péruvienne que sur le versant oriental des Andes.

28 D. Francisco de Avila. A narrative of the errors... Passim. Les Čimu s'étaient avancés sur le plateau et les Inka avaient dû, pour les arrêter, construire des forteresses à l'ouest de leur Empire (Montesinos, Memorias, chap. 9). Les ruines des villes de la côte ont souffert des tremblements de terre et surtout des pluies, d'autant plus redoutables qu'elles sont très rares (Otto Holstein, Chan-Chan, capital of great Chimu. The geographical review, janvier 1927, p. 50). Suivant la forme et la couleur des poteries, on distingue plusieurs périodes dans la civilisation čimu, les unes de développement local, les autres d'influence étrangère (Tiahuanaco).

29 Calancha. Corónica moralizada, liv. 3, chap. 1.

30 La capitale des Čimu rappelle pour Kimmich l'origine asiatique de ses habitants, l'enceinte ressemble à la grande muraille de Chine, plus large en bas qu'en haut, faite de pierres à la base et de briques au sommet; les maisons, petites et à toits inclinés, reproduisent les dispositions adoptées dans les pays de pluie, alors que sur la côte péruvienne il pleut très rarement (Enciclopedia universal ilustrada europeo-americana. Barcelone, I924. Pal. Perú). On a trouvé à Čimu des traces de canaux. Les habitants de la vine d'Eten parlent encore l'ancien langage des Čimu, différent du kičua (Squier, Peru, p. 169). F. de la Carrera a publié à Lima en 1644 une grammaire et en 1680 un dictionnaire de cette langue : Arte de la lengua yunga de los valles del obispado de Truxillo del Perú. Arte y vocabulario de la lengua de los Chimu. V. Paz Soldan. Arte de la lengua yunga. Lima, 1880. – E.W. Middendorf. Die einheimischen Sprachen Perus. Leipzig, 1892, liv. 6.

31 A. Means. La civilización precolombina de.los Andes. Boletín de la sociedaa ecuatoriana de estu­dios historicos americanos, 1919, p. 217.

32 Beuchat. Manuel, 4e partie, ch. 5. H. Saville. The antiquities of Manabi. Final report.

33 Velasco. Historia, p. 156. González de là Rosa. Les Garas de l'Equateur. Journal de la Société des Américanistes de Paris, 1908. Peut-être les fondateurs de cette civilisation de la côte équatorienne sont-ils venus, exceptionnellement, par la voie maritime ; des légendes locales relatives à des débarquements de géants tendraient à le faire croire. Les Inka conquirent cette région, mais ne s'y installèrent point; aussi, dans la carte qui se trouve à la fin du présent volume, ne comprenons nous pas la côte équatorienne dans les limites de l'Empire.

34 Ce nom est tout à fait impropre ; il a été emprunté par les Jésuites établis sur les bords du lac Titicaca à une fraction de la tribu kičua. Nous le conservons parce qu'il est admis par tous les écrivains, quoique Markham ait protesté contre son emploi (On the geographical positions of the tribes which formed the Empire of the Yntas. Journal.of the royal geographical society, 1871, p. 327).

35 Reclus. Géographie universelle, t. 18, p. 641. Posnansky prétend que le lac Titicaca baignait autrefois les murailles de Tiahuanaco (El clima del Altiplano y la extensión del lago Titicaca. La Paz, 1911). « En parcourant les plateaux glacés de la. Bolivie et la région désolée qui a été le berceau historique des Qquichùas, il m'a toujours semblé impossible que les civilisations dont je voyais les traces eussent pris naissance dans de pareilles solitudes, élevées à plus de 4 000 mètres au-dessus du niveau de la mer » (P. Angrand Lettre sur les antiquités de Tiaguanaco, p. 7). V. Markham. The land of the Incas. Geographical journal, octobre 1910.

36 Moreno. Notes on the anthropogeography of Argentina. Geographical journal, 1901, p. 574.

37 Latcham. El comercio precolombiano, p. 10.

38 Stübel. Die Ruinenstätten von Tiahuanaco. Berlin, 1892. – Bandelier. The ruins at Tiahuanaco. Proceed,ings of thte american antiquarian society. New series, vol XXI, 1911, p. 218.

39 Posnansky. Die Altertümer von Tihuanacu. Zeitschrift für Ethnologie, 1913, t. 45,p. 176.

40 Julius Nestler, Beitrage zur Kenntnis der Ruinenstätte von Tiahuanaco. Mitteilungen der K. K. geographischen Gesellschaft in Wien, 1913, p. 226. – Posnansky. Nuevas investigaciones en Carangas. 21e Congrès international des Américanistes, Göteborg, 1924.

41 M. Uhle. Las relaciones prehistóricas entre el Perú y la Argentina. 17e Congres international des Américanistes. Buenos-Aires, 1910. – Debenedetti. Influencias de la cultura de Tiahuanaco, en la región del Noroeste argentino. Revista de la Universidad de Buenos-Aires, 1912, t. 17, p. 326. – R. Levillier. El Perú y el Tucuman en los tiempos prehispánicos, Lima, 1926, p. 61. – B. Brandt, Südamerika, Breslau, 1923, p. 57.

42 Joyce. South American Archaeology, p. 184.

43 M. Uhle. Los orígenes de los Incas, op. cit. – D'Orbigny. L'homme américain, p. 223. – B.Saavedra. El Ayllu, p. 130. Au début du XVlIe siècle un jésuite italien, L. Bertonio, qui vécut au Pérou à la mission de JuIi, de 1581 à 1625, écrivit trois ouvrages sur la langue aymará : Arte breve de la lengua aymará para introducción del arte grande de la misma lengua (Rome, 1603), Arte y gramma­tica muy copiosa de la lengua aymará (Rome, 1603), Vocabulario de la lengua aymará (Juli, 1612). Peu après, D. de Torres Rubio fit paraître un Arte de la lengua aymará (Lima, 1616). Il existe un ouvrage portant le même titre de Diego Gualdo (1612 – s. l ).

44 Posnansky, González de la Rosa et Means prétendent qu'il y a eu deux Empires aymará successifs.

45 Rivero et Tschudi (Antiquités péruviennes, trad. franç., p. 42) et H. Vignaud (Le problème du peuplement initial de l'Amérique, op. cit., p. 53) soutiennent que les Inka viennent des Aymará. Dans la suite de cet ouvrage nous appellerons Empereur ou Roi l'Inka et les Indiens de sang royal faisant partie de la caste supérieure, les Inka.

46 De Créqui-Montfort, Exploration en Bolivie, op. cit. – A. Chervin. Aymaras and quichuas. 18e Congrès international des Américanistes. Londres, 1912, t. I, p. 63.

47 Nordenskiöld. Exploration scientifique au Pérou et en Bolivie. Bulletin de la Société de Géographie, 1905, p. 289. Squier écrit que les Aymará et les Kičua diffèrent autant les uns des autres que les Français des Allemands (Peru, p. 570).

48 Lettre sur les antiquités de Tiaguanaco, p. 9.

49 G. Suarez. Historia general, t. I, p. 34. Les Esmeralda n'ont pas subi l'influence inka, ils parlaient une langue de la famille Čibča.

50 Uhle. La arqueología de Arica y Tacna. Boletín de la sociedad ecuatoriana de estudios historicos americanos, 1919.

51 Notamment dans les parties dernièrement explorées de la grande forêt orientale. Au nord-est de la Bolivie des traces d'habitations révèlent l'existence d'une population jadis nombreuse et différente de celle du plateau (Nordenskiöld. Exploration scientifique au Pérou et en Bolivie, loc. cit.).

52 Rivet. Les origines de l'homme américain, op. cit.

53 Les chercheurs impatients de découvrir la vérité risquent fort d'attribuer à des migrations et à des influences ce qui est le simple résultat d'un développement parallèle du progrès. De nombreux objets précolombiens sont identiques à ceux que les fouilles mettent à jour dans l'Ancien Monde, les vases trouvés par Schliemann sur l'emplacement de Troie sont pareils à ceux du Pérou (G. Suárez. Historia general, deuxième partie, p. 121). Les Inka et les Pharaons se ressemblent par plus d'un point et certains auteurs se sont amusés à établir des listes d'analogies d'où ils concluent à l'origine aryenne des Indiens (Fidel López. Les races aryennes du Pérou). Mais la marche du progrès est inégale, certains peuples étant en avance, certains autres étant en retard, et les formes de ce progrès sont loin d'être identiques. Il est vrai que l'écriture a été inventée deux fois en Egypte et dans l'Amérique centrale (Amelja Hertz. L'Egypte sous les quatre premières dynasties et l'Amérique centrale. Revue de synthèse historique, juin. 1923), mais elle n'existait pas au Pérou, dont le développement était pourtant comparable à celui du Mexique. Si la conception de la royauté était la même chez les Inka et chez les Pharaons, l'organisation sociale de leurs peuples était absolument différente. Gardons-nous donc de tomber dans les deux extrêmes : il est également exagéré de conclure d'une identité de conceptions ou de produits à une influence réciproque, et de négliger cette identité sous le prétexte que tous les progrès sont inévitablement parallèles.

54 M. Uhle . Fondamentos étnicos de la región de Arica y Tacna. Boletín de la sociedad ecuatoriana de studios históricos americanos, 1919.

55 Boman. Migration précolombienne dans le Nord-Ouest d l'Argentine. Journal de la Société des Américanistes de Paris, 1905. M. Nordenskiöld a étudié une migration guarani qui est venue des rives du Parana et du Paraguay au début du XVIe siècle et a été repoussée par les Inka (The guarani invasion of the Inca Empire in the sixteenth century. The geographical review, août 1917, p. 103).

56 Verneau et Rivet. Ethnographie ancienne de l'Equateur, p. 240.

57 Boman. Migration précolombienne, op. cit.

58 Uhle. Ancient south-american civilization. Harpers Magazine, octobre 1923.

59 Garcilaso. Comentarios, liv. 1, chap. 22. – Sahuaraura Inca. Recuerdos de la Monarquía peruana. Paris, 1850. – Montesinos. M emorias, chap. 14.

60 Ondegardo. Copia de carta, p. 449.

61 Jijón y Caamaño y Carlos Larrea. Un cementerio,incásico en Quito, p. 65. – G. de la Rosa. Ensayos de cronología incana. Revista histórica de Lima, 1909, p. 43. – J. de la Riva-Agüero. Examen de los Comentarios, op. cit., p. 559. Wiener admet, en s'inspirant de Montesinos, l'existence de rois-pontifes Pirhua et ensuite de pontifes-rois Amauta avant l'invasion Inka (Essai sur les institutions). – « Garcilaso, écrit Fidel López, en liant Sinši-Roka à Manko-Kapak, supprima d'un trait de plume 4 000 ans de l'histoire du Pérou » (Les races aryennes, p. 279). Il est possible, comme le croit Castonnet des Fosses, que les quatre premiers Inka aient le caractère mythique (La civilisation de l'ancien Pérou, p. 12).

62 Castaing remarque que l'habitude contractée par les souverains d'associer leur fils aîné à l'exercice du pouvoir est peut-être la cause des divergences que l'on rencontre chez les historiens au sujet de la durée des règnes des derniers Inka (Le communisme au Pérou, p. 17).

63 Pacheco Zegarra donne à l'Empire une superficie de 6 millions de kilomètres carrés (Introduction à Ollantay. Paris, 1878, p. XIII), mais il y fait rentrer 2 millions de kilomètres carrés de territoire argentin, ce qui semble fort exagéré.

64 Ondegardo (Copia de. carta, p. 456) constate que les Inka ont régné pendant une courte période de temps avant l'occupation espagnole ; il en conclut que leur pouvoir, né de la conquête, n'était pas encore légitimé par la prescription et que par conséquent le Roi d'Espagne était fondé' à les détrôner, raisonnement singulier et bien caractéristique de la mentalité des juristes de l'époque.

65 D'après G. de la Rosa et A. Means. Fernández Nodal a dressé un amusant arbre généalogique, mais sans aucun caractère scientifique, qu'on trouvera à la Bibliothèque Nationale à Paris sous le titre : Los Yncas del imperio Tahuantinsuyo. Paris, s. d. Mitchell Hmphreys attire notre attention sur les divergences entre les auteurs, mais ne donne pas la liste probable des souverains (Dauer und Chronologie der Inkaherrschaft. Rostock, 1903).



17/06/2011
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